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Suzanne aux yeux noirs

jeudi 17 octobre 2013, par Gérard Lambert - Ullmann

Il y a la chatte nommée « détail », si douce que le diable se nicherait volontiers contre elle. Il y a les cafés où viennent naître et mourir les amours : « C’est fou le nombre d’amours qui viennent mourir dans les cafés. De vrais petits cimetières. » Il y a ce roumain résigné (« Si señor ») qui réveille la mémoire de Jaurès chanté par Brel (« Oui, not’ bon maître »). Il y a ce mot nouveau qu’on apprend au bord du fleuve : le mascaret. Il y a un marin « amariné » à l’enlèvement de sa Marie par son ancien copain. Il y a les dégâts « collatéraux » du « plan social ». Il y a la maison qui ne savait pas que les humains ont des vies beaucoup plus courtes que les maisons.

Il y a des gens qui s’aiment, se sont quittés, s’aiment encore ; des enfants et des papas qui les attendent sous le grand arbre ; des peupliers qu’il ne faut pas couper ; des pommes, des chevaux, des chansons, des câlins. Il y a les brûlures des guerres dans la mémoire ; l’humiliation de trop, l’amour qui la panse ; les envies de grand large ; la vieillesse ; la naissance ; la solitude volontaire qui se défend à coups de Rimbaud.

Il y a tout ça dans les nouvelles de Manon Moreau. Pas d’aventuriers mal rasés, de paysages à « couper le souffle », d’intrigue labyrinthique, mais la subtilité de vies « simples », la justesse des sentiments, toute la tendresse de l’humain.

Et j’ai donc vraiment, vraiment, envie de vous conseiller de les lire.

Manon Moreau, Suzanne aux yeux noirs , Editions Delphine Montalant, 16 €
Delphine Montalant, Les ourmes, 4 chemin des geais, 33340 Queyrac. lolad@club-internet.fr