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Friterie-Bar Brunetti
mercredi 5 août 2009, par
Oh ! Comme on le comprend ce gars que les petits Marius assiègent de leur connerie jusque dans ses bistrots « de la dernière chance », à lui « noircir le paysage » de leur âme dégueulasse et lui « faire dans le verre tourner le vin en vinaigre ».
Oh ! Comme on comprend sa tentation de « s’envelopper dans des manteaux de marmotte pour voyager ailleurs » au lieu de « buriner dur dans la clownerie pour tenter de faire bouillir l’amère marmite du quotidien ».
Comme lui, on en a plus que marre de « la propension des maîtres à vouloir interdire les vagues sur la mer » ; comme lui, on se désole d’être invité à considérer que « l’arrogance des uns encourageant la béate servilité des autres, l’ignoble mascarade semble ne plus devoir connaître ni borne ni fin ». Mais, comme lui, aussi, on a le « rare entêtement des buveurs d’infini » et, comme lui, on aime les zincs où « s’aiguisent à l’heure de l’apéro les théories révolutionnaires les plus audacieuses », ces « havres de grâce » qui « rabibochent » avec la vie.
Alors on cède volontiers à son invite : « Pousse la porte du mastroquet et des souvenirs et pour un temps laisse derrière toi toute la muflerie du monde ». On aimerait même y entraîner quelques compères. Tiens, toi, le curieux, le rêveur ; toi, « jeune agitateur à joues creuses et tignasse drue, vivotant fort serré de menus expédients et d’amours illicites » ; ou toi « fringuant petit Rimbaud se roulant à pleins poils dans la poésie » ; ou même toi, vieux fourbu « pas Tartuffe pour deux tunes » ; ou toi, la trop gentille que la vie à méchamment secouée ; allez-y : poussez la porte de chez Brunetti, grande ouverte par Pierrot ! N’hésitez pas ! Le Pierrot, y n’triche pas ! Dans sa chopine, c’est du bon, du costaud, du fumant. C’est d’la vie qui coule drue. Y a plus qu’à écluser.
Pierre Autin-Grenier, Friterie-Bar Brunetti, L’arpenteur, 10,50 €.