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Une adolescence en Gueldre

samedi 22 novembre 2008, par Gérard Lambert - Ullmann

Si l’on doit tomber amoureux à Amsterdam, il faut que ce soit d’une jeune fille venant « d’un siècle passé » et qui fut cette princesse aux « longues paupières à la transparence bleutée » dont un peintre anonyme d’Anvers, le « maître des demi-figures », fit le portrait troublant, il y a longtemps. Et il faut, évidemment, que ça se passe dans une taverne, « une caverne presque », dont on n’entrevoit d’abord « qu’un comptoir dont la barre de cuivre jaune luit doucement, sous les solives de chêne, dans le reflet sourd des lambris et des verres, avec les arômes fruités d’un exotisme intime ».

Han a connu cet amour de légende, dans cet après guerre qui laisse démobilisé au « sens radical du mot », et il en parle à l’adolescent qui se prépare à rater sa vie parce qu’il voudrait « rester dans l’ombre à feuilleter ses livres et rêver aux plus longues nuits » mais, néanmoins, envisage fébrilement « quelques voyages de mauvais larron ».

Il y a, tout autour, « les toits d’un hameau bleu », « une ombre de résille sur le sable pâle », un grand parc indécis, « le gris des ciels du nord », beaucoup de livres et quelques chansons futiles, un bordel, une ferme, et cette Hollande au « charme enrobé d’images feutrées, commodes et rassurantes ».

L’adolescent s’essaie à l’amour et à la douleur, et Madeleine devient lentement Erica pour que Han aille vivre au désert avec son image, dont il n’aura bientôt plus besoin.

Ce livre est un Pirotte au genièvre. Indéniablement, ce sont les meilleurs.

Jean-Claude Pirotte, Une adolescence en Gueldre, La Table Ronde, 17 €.